jeudi 18 octobre 2007

A. Quelques remarques préliminaires

A.
Tout d’abord, quelques remarques préliminaires

Les Français prirent Tourane le 1er septembre 1858 puis Saïgon le 17 février 1859.

Charles Lemire décrit la situation à l’arrivée des Français au Bas-Cambodge:
1874... “En voulant obliger les Cambodgiens à transformer leurs moeurs, leurs coutumes et jusqu’à leurs vêtements, en défendant les alliances entre les Annamites et les femmes barbares (c’est ainsi que les vainqueurs appelaient les vaincus), en envoyant au Cambodge les chefs d’armée qui y commirent des prédations et outragèrent les membres de la famille royale, les Annamites se firent détester. La révolte des Tay Son avait arrêté leurs empiètements. Lorsqu’ils voulurent les poursuivre de nouveau, les Cambodgiens usèrent de représailles. Il y eut des massacres considérables et les annamites durent se retirer en se contentant de ce qu’ils possédaient déjà.
Tel était l’état de chose lorsque les Français, en s’emparant de la Basse-Cochinchine à la grande satisfaction des Cambodgiens, succédèrent légitimement aux Annamites dans leurs droits de protectorat”.


Georges Maspero, écrit de son côté (“L’empire Khmer, histoire et documents”):
“Ang-Duong se trouvait roi d’un pays occupé à la fois par les Siamois et les Annamites. Les premiers se faisaient céder au nord des provinces entières par les gouverneurs et sans le consentement du roi... Les derniers envahissaient entre temps le sud qu’ils accaparaient au détriment des Cambodgiens."

A noter les termes: “occupé”, “envahissaient” et “au détriment des Cambodgiens”.

On sait aussi qu’à la suite du rétablissement de Gialong sur le trône de l’Annam, la France, comme l’écrit Maspero, “était dans cette partie de l’Indochine, la nation européenne qui s’était attirée... le prestige le plus effectif.”

S. M. Ang-Duong décida de s’adresser à la France, non pas pour céder la Cochinchine à cette dernière mais pour demander aide et assistance afin, non seulement de sortir des emprises siamoise et annamite, mais également et surtout de “récupérer les riches terres si injustement arrachées à ses ancêtres”.

G. Maspero nous donne une interprétation de l’intention de S.M. Ang-Duong à ce sujet.
“Nous croyons, rapporte Maspero, pouvoir assurer que les propositions que Ang-Duong comptait faire au plénitentiaire français étaient les suivantes: lui exposer d’abord ses griefs, ses sujets de mécontentement à l’égard de ses redoutables voisins, déclarer son impuissance à se faire seul justice et, enfin, annoncer sa résolution de se placer sous la protection de la France, à laquelle il céderait, par traité, les territoires enlevés par les annamites au Cambodge et que ceux-ci détenaient toujours, bien que nul acte de cession ne fut jamais intervenu entre les deux États. Les territoires dont il est ici question sont les six provinces, aujourd’hui françaises, de la Basse-Cochichine.”

Ce commentaire de G. Maspero appelle les observations suivantes:
1º/ - S.M. Ang-Duong, en se faisant l’allié de la France, veut seulement que cette dernière l’aide à recouvrir les provinces du Bas-Cambodge qu’il ne songe nullement à rétrocéder à la France comme le confirment ses protestations ultérieures concernant les dites provinces.
2º/ - La France sait bien qu’il n’existe aucun acte de cession, du Cambodge à l’Annam, des province de Cochinchine. Maspero a d’ailleurs précisé qu’il s’agit de “territoires enlevés par les Annamites au Cambodge, et que ceux-ci détenaient toujours, bien que nul acte de cession ne fut jamais intervenu entre ces deux États.”

Maspero (p. 87) dit au sujet de la prise de Saïgon:
“Une expédition commandée par l’amiral Rigault de Genouilly et grossie de troupes espagnoles bombarde Tourane en août 1858 et s’empare de Saïgon en février 1859. Le 5 juin 1862 un traité exigeait de Tu-Duc la cession à la France des trois provinces complètes de Bien-Hoa (Saïgon) et Dinh-Tuong (Mytho) ainsi que Poulo-Condore.
En mars 1861, l’amiral Charner qui commandait le corps d’occupation à Saïgon, avait envoyé à S.M. Norodom un officier chargé de l'aviser de l'intention du gouvernement français de fonder un établissement durable en Cochinchine et lui exprimer son désir d’entretenir des relations amicales avec le gouvernement cambodgien.”

Deux remarques sont à faire à propos de ce texte :
a) L’acte de cession à la France par l’Annam des trois provinces khmères de Cochinchine est nul de plein droit puisque les provinces en question ont été occupées par la force et qu’elles sont toujours revendiquées par le Cambodge.
b) En envoyant un officier “aviser” S.M. Norodom de l’intention du gouvernement français de “fonder un établissement ” en Cochinchine, l’amiral Charner reconnaît implicitement que la Cochinchine est terre cambodgienne.

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